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Derrière les courbures de l’espace-temps (3) : les fondations de l'univers


N.B. : Le livre « DERRIÈRE LES COURBURES DE L'ESPACE-TEMPS » présente ma vision personnelle de l’univers, obtenue au travers d’une enquête débridée à la croisée de la vie et des deux infinis. Il propose une explication, certes imaginaire mais cohérente et possible, de l’origine de l’eau, des espèces vivantes et de l’univers lui-même. On y parle entre autres d’énergie, de vie, de chaîne alimentaire, de quanta d’espace-temps ou « bulles d’espace-temps », de gravitation quantique, d’énergie noire, de matière noire, d’antimatière, de trous noirs, de relativité générale, de bosons de Higgs, d’univers unifié, de fractales, de chaos, de théorie du tout et du Big Bang. L’extrait présenté ci-dessous correspond au chapitre « LES FONDATIONS DE L’UNIVERS » de ce livre (© Anne Spiteri, 2020 - Edition 2020 mise à jour en 2021 - ISBN numérique 979-10-262-5242-9).
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« Puis soudain, le vide me devient visible. Il est fait de minuscules perles translucides. De près, elles contiennent des espèces de tourbillons plus ou moins enchevêtrés, un peu comme ces œufs de poissons à l'intérieur desquels se tortille un embryon gélatineux. » (Extrait du rêve)

Résumé de ce chapitre

Où l'on découvre qu'il faut un nouveau paradigme d'espace-temps pour unifier la relativité générale et la physique quantique ; que seule l'énergie a vocation à fonder et à unifier l'univers ; que l'univers repose sur un continuum d'énergie indifférenciée et neutre fait de brins de flux d'énergie chaotiques et indétectables ; que cette énergie indifférenciée produit des flux fermés qui sont des quanta élémentaires d'énergie, d'espace-temps et d'information ; et enfin que l'univers repose sur les deux vides plein d'énergie que sont la cinquième dimension d'énergie indifférenciée et l'espace-temps des quanta d'énergie infinitésimaux et éphémères.

Il faut un nouvel espace-temps

Le rêve me montre le vide habituellement invisible. Ce vide fait de perles minuscules ne peut être que l'espace-temps lui-même. Mais l'espace-temps est-il le seul vide connu ? Qu'en dit la science ? La science royale de l'espace-temps, c'est la relativité générale, autrement dit la science du « mollusque de référence »1. Je commence donc mon enquête par ce drôle de mollusque. Et il y a effectivement un os à son sujet ! Car c’est étonnant, mais la physique quantique, science de la matière et du vide, ne repose pas sur les mêmes fondations que la relativité générale, science de l'espace-temps et de la gravitation ! Elles divergent sur des points aussi fondamentaux que l'énergie du vide, l'espace-temps et la gravitation. Concernant l'énergie du vide, la physique quantique la définit par l'énergie du vide quantique2, alors que la relativité générale la définit par la constante cosmologique liée à l'expansion de l'espace-temps. Si bien qu'il y a une « catastrophe du vide » : cette énergie vaut 10120 fois plus lorsqu'elle est évaluée par la physique quantique ! Concernant l'espace-temps, celui de la physique quantique se contente de contenir de la matière sans interagir avec elle, alors que celui de la relativité générale est couplé à la matière. L'espace-temps relativiste n'intègre pas la physique quantique mais décrit bien l'univers dans l'infiniment grand ; ou plutôt relativement bien, car il se heurte à une réalité gravitationnelle et expansionnelle pas toujours conforme. C'est ce qui conduit d'ailleurs les physiciens à rechercher frénétiquement une « matière noire » et une « énergie noire » c'est-à-dire invisibles qui composeraient 95 % de l'énergie de l'univers ! Concernant la gravitation, la relativité générale l'assimile à la déformation de l'espace-temps, alors que la théorie quantique des champs n'est pas concernée. La physique quantique décrit bien l'univers dans l'infiniment petit mais est incapable d'expliquer de façon cohérente les quatre forces fondamentales de la nature : les forces électromagnétique, forte et faible regardent la force gravitationnelle en chiens de faïence. C'est sans nul doute parce que cette théorie n'intègre pas l'espace-temps relativiste. En effet, les trois forces non gravitationnelles sont décrites par des champs3 quantiques et liées à l'espace-temps de la relativité restreinte ; alors que la force gravitationnelle est liée à un espace-temps différent, celui de la relativité générale. Certes, toutes ces divergences n'empêchent pas de construire des lasers ou d'aller sur la lune. Mais alors que l'infiniment petit et l'infiniment grand se mélangent lors du Big Bang ou dans les trous noirs, ce n’est pas le cas de leurs sciences respectives, la physique quantique et la relativité générale ! Je ne suis spécialiste d'aucune de ces deux théories, mais le gros bon sens me permet d'affirmer qu'il ne doit y avoir qu'un espace-temps dans l'univers et que toutes leurs divergences se résoudront d'elles-mêmes sur la base de cet espace-temps unique, à condition qu'elle soit bonne. Et ce n'est certainement pas en donnant une touche relativiste à l'espace-temps de la physique quantique ou une touche quantique à l'espace-temps de la relativité générale que l'on pourra unir ces deux théories : ce ne serait pas de la science mais du bidouillage mathématique. Si l'on veut une bonne base d'espace-temps, il faut reconsidérer les choses à la racine. Encore une fois, me direz-vous ! Einstein a en effet déjà brillamment révolutionné l'espace et le temps de Newton : d'un cadre passif, absolu et rigide où le temps s'écoule, il a fait un espace-temps dynamique, relatif et élastique dont la géométrie locale, le fameux mollusque, est couplée à la distribution de matière et d'énergie. En modélisant ainsi l'espace-temps, il a fait faire un pas de géant à nos connaissances sur l'univers. Sauf que, de même que Newton n'a pas expliqué le pourquoi de la force de gravitation, Einstein n'a pas expliqué pourquoi la matière et l'énergie déforment l'espace-temps. Et tant que l'on ne comprendra pas le lien physique intime entre la matière, l'énergie et l'espace-temps, on peut juste affirmer que les formules de la relativité générale sont simplement de meilleures approximations que celles de Newton. La porte d'entrée dans l'unification des théories quantique et relativiste est pourtant là, et nulle part ailleurs : qu'est-ce qui relie la matière et l'énergie à l'espace-temps ? Cela ne devrait-il pas avoir un rapport avec les couples de particules et d'antiparticules virtuelles qui émergent sans cesse du vide quantique sans que l'on n'explique non plus la fonction de ce mystérieux phénomène pourtant omniprésent ? Est-il vraiment nécessaire d'être un grand scientifique pour deviner la nature de ce lien fondamental ? Woody Allen, dont certains des personnages voient la nature comme « un énorme restaurant »4 ou « un cruel et sombre chaos où on s’entrebouffe »5, n’aurait-il pas mieux compris l’essence de l’univers qu’Einstein, qui lie la matière à l’espace-temps sans toutefois donner de sens à ce lien ? Quoi qu'il en soit, puisqu'il n'est pas compatible avec la physique quantique, il y a encore un pas dans le vide à faire à partir de l'espace-temps relativiste. J'espère donc parvenir à comprendre le rêve. Car tous ces exemples montrent que nous avons vraiment besoin d'un nouveau paradigme d'espace-temps pour unifier la relativité générale et la physique quantique, un espace-temps dont les déformations géométriques seraient aussi liées aux fluctuations du vide quantique et qui expliquerait l'énergie du vide. Mais au fait, qu'est-ce que l'énergie ? C'est essentiellement un moteur. C'est du mouvement, de l'action et du changement. Les sciences de l'énergie sont d'ailleurs des sciences de la transformation. En l'absence d'énergie, tout resterait figé, inerte, immuable et sans activité : l'énergie, c'est la vie, l'absence d'énergie, la mort. Cette énergie peut être mécanique, thermique, chimique, nucléaire, électrique ou rayonnante. Elle peut se stocker de différentes façons : l'énergie rayonnante du soleil se stocke par exemple en énergie chimique dans les glucides et les lipides ; l'énergie électrique se stocke en énergie chimique dans les batteries d'accumulateurs ou en énergie mécanique potentielle quand elle est utilisée pour remonter l'eau dans des barrages. Elle ne peut toutefois pas être créée ni détruite, mais seulement se transformer ou se transférer. Dans ces conditions, qu'est-ce qui aurait le plus vocation à réunir et unifier tous les aspects de l'univers, si ce n'est l'énergie qui les transforme sans cesse les uns dans les autres et autour de laquelle tout tourne ? L'espace-temps doit donc être une forme d'énergie, mais encore invisible et sans masse pondérable6.

Forme, information et énergie

Un petit tour dans la nature va nous permettre de découvrir le lien fractal7 entre la forme, l'information et l'énergie. L'information et l'échange d'information grâce la reconnaissance de configurations géométriques est une fractale dans l'univers : elle est utilisée par les organismes vivants, les cellules, les molécules et les atomes. Toutes les espèces vivantes sont capables de reconnaître et de transmettre des signaux informationnels lumineux, chimiques ou mécaniques ; et cette capacité se ramène toujours à un changement de conformation géométrique à l'échelle d'une membrane cellulaire ou d'une protéine réceptrice. Chez l'homme par exemple : les ondes sonores inclinent des stéréocils à la surface des cellules réceptrices de l'oreille interne, ce qui déclenche l'ouverture de canaux ioniques et l'excitation du nerf auditif ; lorsqu'une molécule odorante se fixe sur un site protéique récepteur de l'épithélium olfactif, ce site change de conformation, ce qui déclenche aussi l'ouverture de canaux ioniques et l'excitation du nerf olfactif ; une molécule de rétinène qui reçoit un photon change de conformation, déclenchant ainsi l'excitation du nerf optique. Les protéines sont des biomolécules essentielles dont les propriétés et les fonctions sont liées à la forme, elle-même liée à leurs séquences d'acides aminés. Elles sont capables d'adopter plusieurs conformations selon les stimuli de leur environnement. Elles jouent ainsi des rôles ubiquistes : lorsque des récepteurs protéiques spécifiques fixent un signal, ils prennent une conformation active qui déclenche des relais chimiques ou électriques ; les systèmes immunitaires fonctionnent grâce à la reconnaissance spatiale antigène-anticorps comparable au système serrure-clé ; la pénétration des virus dans une cellule est liée à un changement de conformation de protéines réceptrices ; les protéines enzymatiques ont des sites actifs avec des conformations permettant de réunir de façon spécifique et avec une orientation propice les réactifs des réactions qu'elles catalysent. Quant au lien fractal entre la forme, l'information et l'énergie, c'est la photosynthèse qui l'illustre le mieux. Grâce aux molécules photosynthétiques des chloroplastes, elle transforme l'énergie lumineuse en énergie chimique qu'elle stocke dans les liaisons moléculaires des glucides. À l'inverse, grâce aux molécules de la chaîne respiratoire des mitochondries8, la respiration récupère l'énergie piégée par la photosynthèse dans les glucides. Alors que la photosynthèse consomme de l'énergie solaire, du dioxyde de carbone et de l'eau pour fabriquer des glucides et du dioxygène, la respiration consomme des glucides et du dioxygène pour fabriquer l'énergie chimique universelle des cellules vivantes, l'ATP9, en restituant de la chaleur, de l'eau et du dioxyde de carbone. La photosynthèse devrait être classée comme la première merveille architecturale de la planète : merveille car elle produit le dioxygène et l'essentiel de l'énergie chimique vitaux tout en éliminant le dioxyde de carbone ; première merveille car elle a alimenté en premier l'explosion de la vie et qu'elle est sans cesse le premier maillon de la chaîne alimentaire ; merveille architecturale car on doit tout cela à une incroyable structure tridimensionnelle à l'échelle des cellules, des molécules et des orbitales électroniques10. Chaque chloroplaste, orienté du mieux possible vers la lumière, contient des molécules photosynthétiques regroupées de façon très structurée dans des « photosystèmes », eux-mêmes insérés dans les doubles membranes de minuscules disques soigneusement empilés les uns sur les autres. Chaque mm2 d'une feuille verte contient ainsi plusieurs centaines de milliers de chloroplastes et je ne sais combien de photosystèmes ! Chaque photosystème est constitué d'une « antenne » au cœur de laquelle est enfoui un « centre réactionnel » : plusieurs centaines de molécules de pigments caroténoïdes et chlorophylliens associés à des protéines forment l'antenne qui capte et concentre les photons vers le centre réactionnel composé de seulement deux molécules de « chlorophylle a » associées à des protéines. L'énergie de chacun des photons captés par l'antenne est transmise au centre réactionnel, seul capable d'expulser un électron excité vers la chaîne de transformations chimiques qui aboutit à la synthèse des glucides. Mais comment cette antenne capte-t-elle et transmet-elle les photons des fréquences visibles11, ce qui constitue une information extrêmement sélective par rapport à l'infinité du spectre électromagnétique ? Cela s'explique par les « liaisons conjuguées » qui relient les atomes de carbone de ses molécules pigmentaires en alternant des liaisons « σ » et « π » à recouvrement respectivement axial et latéral : elles entretiennent ainsi des électrons délocalisés plus facilement excitables et plus libres, donc capables d'absorber les photons moins énergétiques de la lumière visible et de transiter d'une molécule à la molécule voisine. En réalité, ce n'est pas l'électron qui transite d'une molécule à l'autre, mais son excitation dont l'énergie correspond à l'énergie du photon absorbé. Car nous sommes ici dans le cas particulier où l'électron excité12 restitue l'énergie absorbée, non pas sous la forme d'un photon mais en la transférant directement à un autre électron appartenant à une molécule voisine. Si ce type de transmission par communauté résonante ou « exciton de Frenkel » est possible, c'est parce que les molécules pigmentaires sont arrangées dans l'antenne avec une grande proximité et des orientations géométriques précises, de telle sorte que leurs orbitales se recouvrent suffisamment pour se communiquer leurs états d'excitation directement, presque instantanément et sans perte. L'antenne est donc un empilement ordonné de molécules pigmentaires, chacune d'entre elles étant comparable à un individu dont le niveau mental et l'individualité s'abaissent dès qu'il s'intègre dans une foule, si bien que tous résonnent d'une même voix. Elle constitue un piège aussi redoutable pour les photons visibles que l'entonnoir du fourmilion pour les fourmis. Ce mausolée à lumière n'est pourtant que géométrie dans l'espace : tout y est affaire d'architecture infinitésimale et même le Taj Mahal n'arrive pas à sa hauteur !

Une énergie indifférenciée et infinie

Revenons à présent à cette énergie autour de laquelle tout tourne dans l'univers, ou plutôt dans les univers. Car rien ne nous permet d'affirmer que l'univers dans lequel nous vivons soit unique. Bien au contraire : de façon fractale, il n'est certainement qu'un point dans l'univers des univers, et l'énergie joue un rôle central et fondateur dans n'importe lequel d'entre eux. Mais quelle énergie ? De même que le corps humain avec toutes ses cellules différenciées en cellules musculaires, nerveuses, osseuses et autres provient d'une cellule indifférenciée totipotente13, seule une énergie de tous les possibles peut fonder cette famille probable d'univers : une énergie sans formes qui, dans certaines conditions, prendrait des formes capables de vivre leurs vies en engendrant leurs propres univers. Autrement dit, seule une « énergie indifférenciée » potentiellement protéiforme peut constituer le fondement des univers. Puisqu'il n'y a pas plus de raison pour qu'il y ait un nombre limité d'univers que pour que notre univers soit unique, cette énergie ne peut pas être finie. J'en déduis donc l'existence d'une énergie à la fois indifférenciée et infinie. L'énergie du soleil est le moteur de la chaîne alimentaire sur la terre, mais cette énergie infinie par rapport aux énergies du vivant est inutilisable telle qu'elle. Même l'énergie des glucides détruirait les cellules vivantes si elle était libérée en une seule fois. Ce n'est qu'avec l'apparition des petites coupures que sont les molécules d'ATP que le vivant a pu utiliser l'énergie du soleil ; et non contente de fournir l'énergie nécessaire au métabolisme de toutes les cellules vivantes, cette molécule joue bien d'autres rôles tout aussi fondamentaux, par exemple dans la structure cellulaire avec le cytosquelette ou dans l'information avec les acides nucléiques. La vie sur terre est tout simplement fondée sur l'ATP ! Découper une grande énergie en petits morceaux pour pouvoir la consommer, c'est fractal : la chimie du vivant qui ne peut pas utiliser l'énergie du soleil autrement que par l'intermédiaire des glucides puis de l'ATP reproduit simplement le fait que l'univers ne peut pas utiliser l'énergie indifférenciée autrement que par l'intermédiaire de quanta. Aucun univers ne pourrait se bâtir directement à partir d'une énergie infinie. Délivrée sans intermédiaires, elle détruirait tout. Si donc notre univers existe sur la base de cette énergie indifférenciée infinie, c'est qu'elle doit se présenter aussi sous la forme de quanta. L'énergie indifférenciée ne pouvant entrer dans l'univers que par ces quanta, tout ce qui s'y passe doit dépendre de ces quanta qui remplissent certainement comme l'ATP plus d'une fonction. Il reste à identifier ces petites coupures énergétiques de l'univers, ce en quoi le rêve va beaucoup nous aider puisque les quanta de l'énergie indifférenciée ne peuvent être que les minuscules perles qu'il nous montre, donc des quanta d'espace-temps. Autrement dit, l'espace-temps est fait de quanta d'énergie ! Certains trouveront que cette énergie autoexistante et infinie a une connotation métaphysique et ils n'auront pas tort. Cela reste toutefois la métaphysique d'une colonie de tubifex14. Car de quoi pourrait être faite une énergie indifférenciée si ce n'est de « brins de flux d'énergie » sans formes ? Plus exactement, de brins de flux turbulents qui esquissent toutes sortes de configurations tridimensionnelles, mais ne font que les esquisser sans jamais conserver de forme identifiable et détectable. Le fondement de toutes les formes doit donc se présenter comme une infinité de minuscules tubes de courant ouverts, interdépendants et éphémères qui se transforment sans cesse de façon chaotique. C'est un continuum de brins de flux désordonnés et infiniment remuants qui se mélangent, s'enchevêtrent, se transforment et tourbillonnent en permanence dans tous les sens. Étant intimement convaincue que la vie telle que nous la connaissons n'est qu'une fractale issue des profondeurs de l'univers, un grouillement infini de tubifex comme fondement de l'univers me paraît bien plus proche de la réalité que l'élégance de n'importe quelle formule mathématique. Car la vraie vie n'est pas franchement élégante : tout n'y est en priorité qu'affaire de chaîne alimentaire et de compétition cruelle pour la survie. À moins de trouver élégants cette guêpe qui fait grandir ses enfants dans une chenille vivante, cette araignée qui aspire l'intérieur d'une coccinelle vivante, ou ce renard qui se jette sur un faisan en train d'engloutir vivantes guêpes, chenilles, araignées et coccinelles ? Sans parler de la cruauté gratuite du genre humain. L'énergie indifférenciée est donc une énergie chaotique, sauvage, déchaînée, libre, indomptée, brute, désordonnée et désorganisée qui esquisse sans cesse des différenciations en toutes sortes de formes. C'est une énergie non « manifestée » dans le sens où elle ne peut pas entrer dans l'univers tant qu'elle n'est pas sous la forme de quanta d'espace-temps : nous baignons dans la mer d'énergie indifférenciée comme dans une cinquième dimension, sans y avoir directement accès. Si les molécules photosynthétiques n'avaient jamais vu le jour, nous baignerions de même dans la mer d'énergie solaire sans disposer d'un iota de nourriture. Tout ce qui est sans forme, sans relation avec aucune forme ou dans une forme incompatible avec celles de notre univers, nous est inaccessible. En particulier, les formes très éphémères qu'esquissent les brins de flux de l'énergie indifférenciée ne sont pas assez abouties pour être détectables. Voilà donc la soupe énergétique primordiale dans laquelle nous baignons. Puisque chaque brin de flux instantané possède une énergie intrinsèque qui ne peut être dissociée du continuum dont il fait partie, on peut dire que l'énergie indifférenciée est infinie en chacun de ses brins : bien qu'éphémère, chaque brin est infini dans le sens où il donne naissance à un autre brin à l'infini, l'énergie ne s'arrêtant jamais. Son caractère chaotique la rend en outre globalement neutre.

Des quanta d'espace-temps

L'énergie profonde de l'univers est si désordonnée et désorganisée que même l'espace et le temps tels que nous les connaissons n'y existent pas. Espace et temps impliquent en effet qu'il y ait de l'ordre, ne serait-ce qu'à cause des distinctions devant-derrière et avant-après. Mais quel rapport peut-il y avoir entre les brins de flux chaotiques de l'énergie indifférenciée et des quanta d'espace-temps ? Comme le suggère le rêve, le même rapport qu'entre un tubifex qui remue dans tous les sens et ses petits œufs bien ordonnés et compactés dans lesquels un embryon se tortille. Observons cette fractale des proportions universelles parfaites qu'est « l'homme de Vitruve »15. Regardons cet homme comme s'il était en train d'écarter l'infini tout autour de lui à la force de ses bras et de ses jambes pour créer un espace intérieur fini. Imaginons enfin que cet espace fini soit délimité par un flux d'énergie qui tourne sur lui-même à la vitesse de la lumière, et nous aurons un quantum d'espace, de temps, d'énergie et d'information. En effet, un flux fermé individualisé dans l'énergie indifférenciée délimite localement un morceau fini d'espace qui correspond à son emprise tridimensionnelle. Il définit de même un morceau fini de temps qui correspond au temps qu'il lui faut pour effectuer un tour complet : en tournant sur lui-même, ce flux pulse selon un rythme à l'origine du temps. En outre, l'énergie de ce quantum d'espace-temps correspond à la capacité du flux en mouvement à se maintenir : comme « l'homme de Vitruve » qui maintient l'infini à sa périphérie, le flux fermé résiste selon ses capacités énergétiques à la pression exercée par l'énergie indifférenciée dans laquelle il baigne. Enfin, l'ordre contenu dans un flux fermé sur lui-même de façon plus ou moins complexe constitue un véritable package d'informations. Si bien que le lien fractal forme-information-énergie remonte à l'apparition des quatre dimensions d'espace et de temps du quantum de l'énergie indifférenciée. Notons que le mouvement infini qui caractérise l'énergie indifférenciée n'est pas perdu lorsqu'elle est conditionnée sous la forme d'un quantum d'espace-temps fini : elle retrouve l'infini en tournoyant sur elle-même ; c'est comme si on avait mis en cage un écureuil plein de vie qui virevoltait en liberté dans sa forêt, en lui donnant un tourniquet pour faire illusion. On ne peut pas délimiter l'espace sans délimiter aussi le temps : ils sont tellement liés ou intriqués qu'ils n'apparaissent qu'ensemble sous la forme d'un quantum d'énergie et d'information. Un quantum d'espace-temps est non seulement un flux d'énergie fermé, mais aussi le plus petit flux d'énergie fermé capable d'émerger directement de l'énergie indifférenciée : c'est la première forme d'ordre bâtie à partir de ses brins de flux chaotiques. On peut se représenter cette création d'ordre dans l'énergie indifférenciée comme la formation de tourbillons hydrauliques au milieu des courants chaotiques d'un torrent ; sauf que dans le quantum d'espace-temps, il n'y a pas de substance mais seulement du mouvement d'énergie. Puisque les quanta d'espace-temps ont une fonction de relais énergétique entre l'énergie indifférenciée et la matière, ce sont forcément des formes éphémères : « l'homme de Vitruve » doit se fatiguer vite. La distinction fini-infini ou ordre intérieur-chaos extérieur opérée par le quantum d'espace-temps aurait aussi pu se prévoir du fait qu'elle caractérise l'apparition de la vie sur terre. De façon schématique en effet, la toute première cellule vivante ne doit son existence qu'à une double membrane sphérique de lipides capable d'isoler un milieu intérieur du milieu extérieur. Cet espace intérieur fermé a joué un rôle de catalyseur en permettant à des éléments chimiques choisis de se rencontrer et de s'ordonner pour réagir entre eux. Les cellules plus évoluées des eucaryotes ont même inclus en leur sein une seconde double membrane sphérique ; cette « membrane nucléaire » isole, non pas le cytoplasme du milieu extérieur comme la « membrane externe », mais les chromosomes du cytoplasme. Faire apparaître un morceau d'espace fini dans le vide infini, c'est donc extraordinaire et fractal : ce truc si simple a engendré toute la complexité de l'univers et de la vie ! Le rêve indique que ces perles sont minuscules, mais à quel point ? Étant situées à l'intersection de la physique quantique et de la relativité générale, elles ne peuvent évoluer qu'à l'échelle des « unités de Planck »16. Leur taille est donc de l'ordre de la « longueur de Planck » égale à 1,6.10-35 m. Puisque le quantum de temps est le temps nécessaire pour que le flux qui circule à la vitesse de la lumière effectue un tour plus ou moins alambiqué sur lui-même et que la perle mesure environ 1,6.10-35 m, il doit être de l'ordre de grandeur du « temps de Planck » égal à 5,4.10-44 s. Le quantum d'espace-temps est donc à la fois la règle la plus minuscule et l'horloge la plus rapide de l'univers ! C'est un étalon local et éphémère de mesure de l'espace et du temps. Dans ce contexte, les intervalles d'espace et de temps sont les intégrales locales des quanta d'espace et de temps infinitésimaux définis par ces quanta d'énergie : ce processus d'intégration permet à l'espace de s'incrémenter et au temps de s'écouler. Notons que le quantum de l'énergie indifférenciée n'est pas un objet dans l'espace-temps mais l'espace-temps lui-même ! Au final, ce flux d'énergie individualisé et conditionné de façon éphémère dans un tout petit morceau fini d'espace-temps, c'est l'ATP de l'univers, sa petite monnaie énergétique !


Fig. 3: Quantum d'espace-temps et clé du sol de l'univers


Un ancien rêve m'est revenu à l'esprit tandis que je rédigeai ce paragraphe : « On me montre une immense clé de sol refermée sur elle-même et dessinée en lumière blanche qui scintille dans le ciel noir étoilé. C'est un flot de lumière qui circule en boucle et qui s'impose à moi comme la magnificence et la paix. On m'explique que c'est la brique secrète de l'univers, mais je le savais déjà en mon for intérieur ». Cette clé de sol était en relief dans le rêve, le flot de lumière passant alternativement au premier plan et à l'arrière-plan. Je réalise à présent qu'elle est la représentation la plus simple et lumineuse possible d'un flux d'énergie tournoyant sur lui-même, donc d'un quantum d'espace-temps. D'ailleurs, dans la « langue des oiseaux » utilisée par les rêves, le terme sol fait tout autant référence à la note de musique qu'au sol. Et ce sol qui émergeait des profondeurs du ciel nocturne ne pouvait être que le sol de l'univers, à savoir l'espace-temps. Ce rêve me donnait donc à la fois la clé du sol et la clé de sol de l'univers : la clé du sol avec le tourbillon d'énergie prisonnier d'un labyrinthe d'espace-temps, la fractale primordiale sur lequel repose tout l'univers ; la clé de sol avec la résonance fondamentale, le son originel qui a orchestré et qui orchestre toujours et en ce moment même le concerto de l'univers. Kekulé aurait découvert l'énigmatique formule développée du benzène C6H6 après avoir rêvé d'un serpent qui se mordait la queue. Si cette histoire est vraie, je trouve que ces deux rêves se ressemblent dans la mesure où ils évoquent tous les deux un circuit d'énergie fermé. Le rêve de Kekulé n'avait-il donc pas une signification plus profonde que celle de la structure cyclique de la molécule de benzène ? Mais revenons à nos univers. L'énergie indifférenciée est le soutien et le moteur de tous les univers. Chacun d'entre eux n'est qu'une manifestation particulière de cette énergie infinie, chaotique et neutre. Il n'a accès qu'aux formes de plus en plus évoluées et complexes17 mais compatibles entre elles que peut prendre sa forme la plus primitive : son espace-temps. L'énergie indifférenciée n'est pas forcément accompagnée d'espace-temps donc d'univers, mais aucun espace-temps ne peut exister sans elle. Des particules élémentaires jusqu'aux galaxies, notre univers prend donc ses racines dans un double soubassement de vides plein d'énergie. Le premier vide, l'énergie indifférenciée, génère un second vide fait de ses quanta, l'espace-temps. L'énergie indifférenciée est un vide encore inconnu sous-jacent à l'espace-temps. L'énergie de ce vide profond reste non manifestée dans les coulisses de l'univers ; elle n'entre sur la scène de l'univers que par la porte de l'espace-temps et sous la forme de quanta. Ces quanta baignent dans la mer d'énergie indifférenciée comme dans un milieu interstitiel. Des quanta de vide qui baignent dans un océan de vide, voilà donc les fondations éminemment mouvantes de l'univers ! Ces deux sortes d'énergie y sont omniprésentes, même au sein de la matière, mais elles restent si lointaines : le vide profond est indétectable parce qu'il n'a pas de formes ; l'espace-temps est la forme d'énergie la plus primitive que nous puissions espérer détecter mais il restera invisible tant que nos instruments ne pourront pas pénétrer dans l'échelle infra-particulaire et ses intervalles infinitésimaux d'espace et de temps.





Notes (retourner à la page web précédente pour retrouver le corps du texte)

1 L’espace-temps d’Einstein est « un corps de référence non rigide » qui se déforme en permanence et de partout comme un mollusque.

2 Selon les principes de la physique quantique, le vide en l'absence de toute matière est plein d'énergie. En vertu de l'équivalence masse-énergie, ses fluctuations d'énergie se matérialisent sous la forme de couples de particules-antiparticules à durée de vie très brèves. Il est donc rempli de particules virtuelles qui s'annihilent entre elles juste après être apparues spontanément en lui empruntant de l'énergie.

3 Un champ classique définit la valeur, en fonction du temps, d'une grandeur physique en tous les points de l'espace. Un champ quantique, partout présent dans l'espace-temps, a aussi un aspect particulaire : les particules élémentaires et leurs interactions sont des « condensations », « des perturbations », des « excitations » locales de ce champ.

4 « Pour moi, la nature c'est... des araignées et des punaises, et des gros poissons qui mangent des petits poissons, et des plantes qui mangent des plantes, et des animaux qui mangent... C'est comme un énorme restaurant ! » (Woody Allen, « Love and death » 1975).

5 Woody Allen, « Whatever works » 2009.

6 Après avoir supprimé l'éther en 1905, Einstein a reconsidéré sa position en 1920 lors de l'exposé « L'éther et la théorie de la relativité » à l'université de Leyde où il conclut : « Selon la théorie de la relativité générale, l'espace est pourvu de propriétés physiques, et donc dans ce sens-là, un éther existe. Selon la théorie de la relativité générale, un espace sans éther est inconcevable ; en effet, d'une part, la propagation de la lumière y serait impossible, et d'autre part, il n'y aurait aucune possibilité d'existence pour les règles et les horloges et donc pour les intervalles spatio-temporels au sens physique. Cependant, on ne doit pas concevoir cet éther comme pourvu de la propriété caractéristique des milieux pondérables d'être constitué de parties pouvant être suivies dans le temps ; on ne doit pas lui appliquer la notion de mouvement. »

7 Le terme « fractal » signifie auto-similitude et est utilisé dans cet ouvrage pour les formes géométriques mais aussi dans un sens plus large de schéma comportemental.

8 Les mitochondries sont des organites présents dans le cytoplasme des cellules « eucaryotes » (avec un noyau, par opposition aux « procaryotes »), les chloroplastes dans celui des cellules eucaryotes photosynthétiques.

9 Molécule d'adénosine triphosphate.

10 L'orbitale atomique est une fonction mathématique ou « fonction d'onde » qui décrit la probabilité de présence d'un électron en chaque point donné de l'espace, au moyen de trois nombres quantiques d'énergie, de forme et d'orientation. Les liaisons covalentes consistent en une mise en commun d'électrons de la couche externe de chacun des atomes participants. C'est le recouvrement de leurs orbitales qui crée une orbitale moléculaire. Il y a deux types de liaisons covalentes : la liaison σ dans laquelle les deux orbitales sont alignées avec un recouvrement axial, et la liaison π moins énergétique dans laquelle les deux orbitales sont côte à côte avec un recouvrement latéral. En s'engageant dans des liaisons chimiques, les orbitales d'un même atome peuvent changer de configuration géométrique. Dans l'exemple du carbone de la molécule CH4, son orbitale sphérique et ses trois orbitales axiales se réarrangent selon quatre orbitales hybrides disposées selon un tétraèdre régulier. De façon générale, les orbitales des atomes qui se lient entre eux se réarrangent le plus symétriquement possible, chacune ayant la même énergie, de façon à diminuer l'énergie de la molécule et à augmenter sa stabilité.

11 Les pigments de l'antenne n'absorbent presque que les fréquences des couleurs rouges et bleues.

12 Quand un électron absorbe de l'énergie, il passe de « l'état fondamental » à un « état excité » : il saute de son orbitale habituelle la moins énergétique donc la plus stable possible, à une orbitale plus énergétique donc plus éloignée du noyau et moins stable. Si sa nouvelle énergie est trop élevée, il est arraché de l'atome ; sinon, il redescend presqu'instantanément sur l'orbitale la moins énergétique possible disponible, en restituant l'énergie absorbée sous la forme de photon, de chaleur ou directement à un autre électron.

13 Le noyau de l'ovule fécondé contient l'ensemble des gènes nécessaires au développement de toute la variété des cellules de l'organisme adulte.

14 Les tout petits vers rouges qui grouillent dans la vase au fond des cours d'eau.

15 Dessin de Léonard de Vinci représentant un homme dans un cercle, avec les bras et les jambes écartés. Un homme de Vitruve dynamique rappellerait le Shiva dansant à l'entrée du CERN, qui pourrait représenter le jeu éternel de l'énergie cosmique.

16 Ces unités de mesure sont calculées sur la base des constantes physiques fondamentales, le temps de Planck étant le temps nécessaire à la lumière pour parcourir la longueur de Planck.

17 Dans notre univers, rien que pour les particules élémentaires, on connaît treize bosons, douze fermions et douze antifermions. Pour les atomes, le tableau périodique en présente environ cent vingt. Quant aux molécules, on n'en connaît pas le nombre pour la terre et encore moins pour tout l'univers.


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