L'azote ammoniacal et les nitrites constituent les premiers stades de la décomposition des matières organiques azotées dans les cours d'eau.
Schématiquement, l'azote ammoniacal dissous dans l'eau est présent sous forme d'ammoniaque (NH
3) si le pH est supérieur à 8 ou d'ammonium (NH
4+) si le pH est inférieur à 8. Les pH rencontrés usuellement déplacent cet équilibre dynamique en faveur de l'ammonium.
Ce qui tombe bien puisque l'ammoniaque est particulièrement toxique pour la quasi totalité des organismes aquatiques alors que l'ammonium ne l'est seulement dans des concentrations élevées.
L'ammonium et l'ammoniaque sont immédiatement transformés, en présence des bactéries Nitrosoma, en nitrites (NO
2-) très toxiques pour les poissons. Ces nitrites sont normalement oxydés à leur tour en nitrates (NO
3-) sous l'effet des bactéries Nitrobacter.
L'ammoniaque, l'ammonium et les nitrites sont des substances naturelles qui se forment et disparaissent sans cesse. Mais leur présence effective dans les eaux n'est que très rarement d'origine naturelle. Elle est révélatrice d'une saturation en pollution organique des écosystèmes aquatiques.
Nous traitons donc dans un même article l'ammonium (LTC = 0,5 mg/L) et les nitrites (LTC = 0,3 mg/L) qui sont tous deux des macropolluants toxiques indicateurs de pollution excessive par les matières organiques azotées d'origine le plus souvent urbaine et industrielle mais aussi agricole.
Les cartes de qualité sont présentées à part pour l'ammonium puis pour les nitrites. Nous présentons aussi des cartes de qualité réunissant ces deux polluants du point de vue de la toxicité cumulée qu'ils occasionnent dans les eaux des rivières.
Méthodologie
Le lecteur est renvoyé à la rubrique
Coin calcul qui présente l'ensemble des méthodes d'évaluation Eau-Evolution. Pour réaliser les cartes de qualité, on a appliqué la méthodologie Eau-Evolution présentée dans l'article
Comment sont réalisées les cartes de qualité des rivières.
Les calculs de qualité sont effectués avec Excel 2007. Les cartes de qualité sont réalisées en langage PHP.
Par souci de transparence, les points les plus pollués sont placés au-dessus et, s'ils occultaient ainsi les points les moins contaminés, avec une taille réduite par rapport à ces derniers. Le lecteur est invité à utiliser l'outil
LES CARTES INTERACTIVES pour fabriquer des cartes plus personnalisées (sélection des seuils, des couleurs, des tailles, des stations à afficher, etc.).
Particularités des données Ammonium et nitrites
Les ions NH
4+ et NO
2- étant solubles, la fraction des mesures n'a pas trop d'importance et on n'en tient donc pas compte pour les calculs, mais on note que :
Les bassins Seine-Normandie et Loire-Bretagne fournissent les données NH
4+ sur le support "eau filtrée". Tandis que Les bassins Artois-Picardie, Rhin-Meuse, Adour-Garonne et Rhône-Méditerranée-Corse les fournissent sur le support "eau brute". En Seine-Normandie et Rhône-Méditerranée-Corse, quelques stations sont mesurées en eau brute et/ou en eau filtrée.
Les bassins Seine-Normandie, Loire-Bretagne et Rhône-Méditerranée-Corse fournissent les données NO
2- sur le support "eau filtrée". Tandis que Les bassins Artois-Picardie, Rhin-Meuse et Adour-Garonne les fournissent sur le support "eau brute". En Rhône-Méditerranée-Corse, quelques stations sont mesurées en eau brute et/ou en eau filtrée.
En cas de doublons, à savoir la même substance recherchée deux fois ou plus à la même date sur la même station, notre stratégie est la suivante : privilégiant le point de vue patrimonial et non réglementaire sur l'état des eaux, il nous importe finalement peu que ces doublons soient liés à tel ou tel producteur ou réseau de données. On élimine donc les doublons en conservant en priorité la valeur quantifiée maximale s'il y a des valeurs quantifiées.
Calculs par station et sélection des points
Pour chaque station de mesure de la qualité de l'eau, on a calculé la concentration maximale en ammonium ou en nitrites, sans aucun écrêtage, rencontrée en 2007. La valeur la plus élevée rencontrée dans l'année sur une station de mesure laisse augurer de l'ampleur des pollutions et de la gamme des autres valeurs susceptibles d'être mesurées tout au long de l'année sur cette même station.
Pour élaborer une indication de pollution qui ne soit pas complètement éloignée de la réalité, Eau-Evolution ne retient pour chacun des polluants ammonium ou nitrites que les stations avec au moins 6 mesures dans l’année.
Les LQ rencontrées varient entre 0,01 mg/L et 0,5 mg/L pour l'ammonium et entre 0,01 mg/L et 0,5 mg/L (une valeur de LQ égale à 1,5 mg/L nous parait aberrante) pour les nitrites.
8,5 % des stations des cartes présentées ci-dessous ne sont pas quantifiées pour l'ammonium et 8 % pour les nitrites. Comme les LQ sont parfois assez proches des valeurs mesurées, on a construit deux types de cartes en attribuant aux mesures non quantifiées la valeur soit 0 µg/L (concentrations sous-évaluées), soit la LQ de l'analyse (concentrations surévaluées). La réalité se situe entre les deux pour ces stations non quantifiées.
Pour les calculs du cumul NH
4+/NO
2-, on ne sélectionne que les prélèvements d'eau où les deux paramètres sont simultanément recherchés. La somme des doses toxiques est effectuée en ramenant à 0 les mesures non quantifiées, ce qui sous-évalue d'autant plus la toxicité réelle que les LQ sont élevées.
Seules les stations donnant lieu à au moins 6 mesures dans l'année pour chacun des polluants sont sélectionnées.
Les cartes de qualité
Le fond explicatif Eau-Evolution qui souligne les grandes zones urbaines et industrielles en relation avec la pollution des rivières nous paraît le mieux adapté pour l'ammonium et les nitrites :
________Zones Villes-Industries________ | _________Rivière_________ |
Pau | le Gave de Pau |
Toulouse | la Garonne |
Angoulême | la Charente |
Limoges | la Vienne |
St Etienne | la Loire |
Lyon à Valence | le Rhône |
Mulhouse à Strasbourg | l'Ill |
Nancy à Thionville | la Moselle |
Lille-Valencienne | Divers |
Antibe-Nice | Divers |
Marseille-Marignane | Divers |
Paris | la Seine |
Rennes | la Vilaine |
Orléans à Tours | la Loire |
Mais comme ces polluants peuvent aussi avoir une origine agricole, il est intéressant de superposer ce fond villes-industries avec le fond des grandes zones agricoles.
Les concentrations sont exprimées en mg/L d'ions NH
4+ ou d'ions NO
2-.
Rappelons que ces cartes traduisent les méthodes d'évaluations patrimoniales indépendantes et affranchies de tout aspect réglementaire propres à Eau-Evolution, et que chacun est invité à apporter sa critique et sa contribution pour les améliorer.
L'ammonium
De façon à pouvoir estimer au mieux l'ammonium, voici 2 cartes réalisées avec les mêmes valeurs par station, mais présentées avec des seuils (couleur noire) croissants égaux respectivement à 0,5 mg/L et 1 mg/L :
Les concentrations maximales en 2007 vont jusqu'à 46,8 mg/L, soit 93 LTC, de NH
4+.
Les zones les plus concernées par l'ammonium en 2007
Ci-dessous, les zones qui sont, toujours bien entendu à partir des données brutes disponibles et des méthodes d'évaluation Eau-Evolution, les plus concernées par l'ammonium en 2007 :
La taille des points est proportionnelle aux valeurs de façon à ce que l'on distingue plus nettement les zones concernées.
Les nitrites
De façon à pouvoir estimer au mieux les nitrites, voici 2 cartes réalisées avec les mêmes valeurs par station, mais présentées avec des seuils (couleur noire) croissants égaux respectivement à 0,3 mg/L et 0,8 mg/L :
Les concentrations maximales en 2007 vont jusqu'à 38 mg/L, soit 126 LTC, de NO
2-.
Les zones les plus concernées par les nitrites en 2007
Ci-dessous, les zones qui sont, toujours bien entendu à partir des données brutes disponibles et des méthodes d'évaluation Eau-Evolution, les plus concernées par les nitrites en 2007 :
La taille des points est proportionnelle aux valeurs de façon à ce que l'on distingue plus nettement les zones concernées.
Le cumul ammonium/nitrites
Si le cumul NH
4+/NO
2- ne peut être apprécié en effectuant la somme de leur concentration dans un même prélèvement, il peut l'être néanmoins avec la somme de leur toxicité respectives exprimées en nombre total de doses toxiques (voir la note méthodologique
Comment Eau-Evolution évalue les contaminations chimiques et la toxicité).
Rappelons qu'il s'agit de toxicité chronique (LTC), et que la toxicité aigue (LTA) peut s'envisager en moyenne à partir de la valeur de 4 fois la dose chronique LTC.
De façon à pouvoir estimer au mieux la toxicité de ce cumul, voici 3 cartes réalisées avec les mêmes valeurs par station, mais présentées avec des seuils (couleur noire) croissants égaux respectivement à 2, 4 et 8 doses toxiques :
Les nombre de doses toxiques cumulées dans un même prélèvement d'eau en 2007 vont jusqu'à 127 doses toxiques (essentiellement à cause des nitrites).
Les zones les plus concernées par le cumul ammonium/nitrites en 2007
Ci-dessous, les zones qui sont, toujours bien entendu à partir des données brutes disponibles et des méthodes d'évaluation Eau-Evolution, les plus concernées par le cumul ammonium/nitrites en 2007 :
La taille des points est proportionnelle aux valeurs de façon à ce que l'on distingue plus nettement les zones concernées.
Quelques commentaires
La situation générale n'est pas très brillante pour ces révélateurs de l'efficacité des stations d'épurations collectives ou industrielles et des méfaits de l'agriculture intensive.
Il y a encore trop de pollutions organiques dans les rivières. On les voit nettement formant des panaches le long des rivières qui drainent les agglomérations et les zones industrialisés. Mais il subsiste aussi plusieurs poches étendues de concentrations élevées en lien avec les activités agricoles.
La plupart des milieux aquatiques n'ont manifestement pas une capacité d'autoépuration suffisante pour les absorber. Les normes des rejets sont donc toujours inadaptées et/ou pas respectées, alors que l'on connait le problème depuis bien longtemps !
L'ordre de grandeur de la toxicité des macropolluants est loin d'être négligeable. Cette toxicité s'ajoute et agit en synergie avec celle des micropolluants (voir
Carte de qualité des rivières : tous les micropolluants cumulés dans l’eau en 2007 (pesticides, HAP, PCB, autres substances de synthèse et métaux) en affaiblissant l'état général des organismes aquatiques et en les rendant plus vulnérables.
Création : 20 février 2010
Dernière actualisation :